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Dernièrement, je me faisais la réflexion que nous étions assez discrets dans nos communautés au sujet de Dieu. Certes, nous sommes des religieux assidus à la prière. Nous nous adressons à Dieu Père, Fils et Esprit dans la liturgie plusieurs fois par jour. Je crois aussi que nous avons à coeur d’entretenir notre relation avec lui dans l’oraison et par l’étude. Mais dans les faits, les conversations que nous avons portent rarement sur Lui. Pourtant, à l’image de saint Augustin, nous nous définissons comme des chercheurs de Dieu : « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre coeur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi. » Aimer Dieu, c’est le chercher. Pourquoi sommes-nous si discrets sur notre approche du mystère divin ? Avons-nouspeur d’être jugés, ou bien encore d’être moqués ? Je dois dire que, pour moi, ce silence est une question lancinante. Nous sommes dans un monde qui veut évacuer la présence de Dieu. « Où est-il ton Dieu ? », dit le mécréant dans le Psaume 42, il y a plus de 2 000 ans. Aujourd’hui, la question nous est encore posée avec force. Certes, beaucoup de nos contemporains ne croient pas ou plus en Dieu. Ils ont abandonné l’Être suprême qui surplombait l’univers et qui ne répondait pas à leurs questions : pourquoi le mal et la souffrance, pourquoi l’injustice ? Ils ont tourné le dos à un Dieu impersonnel, qui était plus conçu comme une puissance capable de répondre à tous leurs désirs et tous leursbesoins qu’un Dieu proche de l’homme en Jésus-Christ.
Dieu est le compagnon de nos vies. J’aime le Psaume 62 qui met sur les lèvres de l’homme cet appel : « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l’aube, mon âme a soif de toi. » La vie d’un religieux a pour horizon cette quête incessante du Dieu d’amour. Nous pouvons le rencontrer dans la Création, dans les splendeurs de l’Univers, mais nous savons qu’il est aussi présent dans l’autre, dans les frères et soeurs qui cheminent avec nous.
Le monde sécularisé peut être une opportunité pour aller plus loin dans la recherche de Dieu. Je ne pense pas que le Dieu de la foi chrétienne était plus facile à découvrir en temps de chrétienté. Il y avait certes un environnement religieux qui faisait que l’existence de Dieu semblait être une évidence, mais sommes-nous sûrs que le monde était pour autant évangélisé en profondeur ? Le Dieu qui était adoré et le plus souvent craint était-il le Dieu dévoilé et révélé en Jésus-Christ ? Aujourd’hui, nous avons perdu les béquilles d’une foi encore portée par une certaine culture, il nous faut avancer résolument dans une foi adulte et capable de rendre compte de son espérance.
Alors, faisons de nos communautés assomptionnistes, mais aussi de nos oeuvres, des aréopages où nous pouvons parler de Dieu en toute sérénité. Dieu caché, mais aussi Dieu qui se laisse trouver, comme le pensait Blaise Pascal. Je souhaite que nous ayons aussi la capacité de manifester Dieu par notre vie quotidienne. Un sourire, un pardon, un regard de tendresse, une aide donnée à celui qui tend la main, tout cela rend visible le Dieu de notre foi.
Chercher Dieu, c’est notre vocation. Pour cela, nous avons le trésor de l’Eglise et de la tradition. Prenons du temps pour explorer les richesses de notre charisme. Regardons comment Emmanuel d’Alzon se dévouait à la cause de Dieu. Quandil parlait des « droits de Dieu », il mettait en valeur le primat de ceux-ci pour mener une vie conforme à notre condition de fils en Jésus-Christ. Oui, Dieu a des droits sur nous parce qu’il est notre père et créateur. Je crois que l’Assomption peut aller plus loin dans sa quête de Dieu. Dans un monde où le futile et l’éphémère semblent triompher, nous avons une valeur sûre : notre foi en Dieu.
P. Benoît Grière
Supérieur Général des Augustins de l’Assomption