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Lectio Careme 1A

L eventjeudi 10 octobre 2024

LECTIO CAREME 1 A

1 Mars 2020

Trois désirs, trois pièges, trois lieux d’amour.

On peut lire le récit des tentations de Jésus à la lumière de trois désirs fondamentaux de tout être humain : le désir de sécurité et de survie ; le désir de reconnaissance et d’amour ; le désir de pouvoir et d’avoir une influence. Désirs légitimes et constitutifs de notre psychisme. Chacun est une porte d’entrée pour la tentation comme pour la grâce.

La première tentation de Jésus, celle sur le pain, rejoint son désir fondamental de survie. Il a très faim et il est en danger de mort. Sa réponse est la réaffirmation que sa vie a pour but de faire la volonté du Père et non de survivre. Sa nourriture, c’est de faire la volonté du Père, d’obéir à la Parole. Sa relation au Père est l’essentiel et Jésus ne bougera pas d’où il est, même en danger, si c’est là que le Père le veut. Aucun accaparement chez lui : le pain il le multipliera pour les autres. Et il se fera lui-même pain pour se donner.

Pour nous cette tentation peut venir par un simple désir d’avoir un peu moins faim ou froid ou chaud, d’avoir un peu de confort et moins de fatigue. Cela peut être la peur plus ou moins avouée devant la maladie ou la vieillesse. Le désir d’avoir toujours un peu plus de biens matériels. La tentation est l’illusion de croire qu’il est possible et souhaitable d’éviter toute souffrance ou même la mort, et donc leur évitement à tout prix ou leur non-acceptation. Nous avons un chemin à faire (et le Carême nous en donne l’occasion) pour intégrer notre corps et ses besoins dans notre relation à Dieu. Le Carême nous rappelle aussi que nous vivons de sens plus que de pain et que le sens nous est révélé dans la Parole de Dieu.

La deuxième tentation rejoint le désir fondamental d’être reconnu et aimé. C’est cela qui nous a permis, enfants, de nous construire et d’acquérir une saine auto-estime. Adultes et disciples du Christ, le désir de reconnaissance peut subtilement pervertir notre service et nos relations. Il est difficile d’accepter les échecs sans amertume, il est très difficile d’aimer de manière totalement cachée et désintéressée, sans rien attendre en retour. Dans l’évangile, le tentateur fait miroiter aux yeux de Jésus le rêve d’être porté par les anges dans un magnifique vol plané du pinacle du Temple au parvis : l’admiration de la foule éberluée et conquise, et surtout une attention spéciale, une protection particulière du Père pour son enfant bien-aimé qui ne doit pas se blesser. Jésus répond : « Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu ». Tu ne réclameras pas de consolations ni de signes spéciaux de Son amour. Dieu n’est pas une compagnie d’assurances. Tu feras confiance.

La troisième tentation est celle du pouvoir. Bien entendu, dans le cas de Jésus, c’est pour le bien : il s’agit de faire advenir le Royaume qui est le but de sa mission. Pour tout être humain il y a aussi naturellement le besoin de sentir qu’on a une influence sur le monde, qu’on a une autorité sur les autres, qu’on est supérieurs… Peut-être est-ce cela qu’on voit déjà chez les bébés quand ils jettent de manière répétée leur jouet par terre pour voir l’adulte le leur rendre ! La conversion touche ici tout espace, même minime apparemment, où nous exerçons un pouvoir ou aimerions l’exercer.. Jésus ne laisse pas cette tentation blesser sa relation filiale au Père. C’est de Lui seul qu’il reçoit son autorité et sa mission. Chez lui le pouvoir ne sera que service. Il ne fera de rien, même du Royaume à étendre, une idole qui l’empêcherait d’appartenir entièrement au Père dans l’adoration : « Tu adoreras le Seigneur ton Dieu, c’est Lui seul que tu serviras ! »

Sr Bénédicte Rollin. Vilnius