local_offer JPICS local_offer Spiritualité

Vers une liturgie qui prend soin de la création : un appel à la conversion écologique à partir de la foi

V eventdimanche 27 juillet 2025

Le processus œcuménique qui a accompagné le développement de la Journée de la Création comme célébration chrétienne commune a franchi ces derniers mois une étape significative. Depuis la Conférence historique d’Assise en mars 2024 jusqu’à la récente Conférence œcuménique pour le centenaire de Nicée, tenue en mai 2025, un large consensus s’est formé autour de la proposition d’établir cette date comme une fête liturgique officielle, partagée par les Églises chrétiennes suivant le calendrier occidental.

Dans ce cheminement, notre Supérieure générale a joué un rôle actif, en tant que bibliste invitée par la Conférence épiscopale asiatique pour collaborer à la rédaction du document final. Ce document, désormais officiellement approuvé, comprend la proposition du formulaire liturgique pour la “Messe pour la sauvegarde de la création”, accompagné de lectures bibliques et de prières soigneusement sélectionnées.

Ce geste n’est ni purement administratif ni symbolique. Il est le fruit mûr d’une lecture croyante des signes des temps et d’une réponse priante et sacramentelle au cri de la terre et des pauvres. Comme l’a exprimé sœur Rekha : « Célébrer la création comme mystère de salut, c’est proclamer l’amour originel de Dieu, renouveler notre conscience de créatures, et nous disposer, à l’exemple de Marie, à garder et faire croître ce qui ne nous appartient pas. »

D’un point de vue théologique, cette nouvelle messe repose sur une intuition essentielle : la création n’est pas un thème ajouté à la foi, mais le lieu où commence l’histoire du salut et l’espace dans lequel le Verbe s’est fait chair. La liturgie, qui actualise toujours le mystère pascal, est aussi l’espace où la création est accueillie, offerte et transformée.

Les lectures proposées en témoignent. Le Livre de la Sagesse (Sg 13, 1-9) invite à découvrir dans la beauté de la création le visage du Créateur. L’hymne aux Colossiens (Col 1, 15-20) offre une vision profondément christologique du cosmos, dans lequel tout a été créé « par lui et pour lui », et tout sera réconcilié par sa croix. L’Évangile selon Matthieu, qu’il s’agisse de l’appel à la confiance dans la providence divine (Mt 6, 24-34) ou de la scène où Jésus apaise la tempête (Mt 8, 23-27), rappelle que la création est entre les mains du Seigneur et nous invite à vivre dans la foi, et non dans la peur.

Le Missel romain, avec l’approbation du pape Léon XIV, a accueilli ce nouveau formulaire parmi les Messes pour diverses nécessités, permettant sa célébration dans des contextes pastoraux spécifiques. Mais au-delà de la norme liturgique, c’est une opportunité spirituelle et communautaire qui s’ouvre à nous pour renouveler notre relation avec Dieu, avec les autres et avec la terre. Comme le souligne Laudato si’, ces trois relations sont intimement liées, et leur rupture constitue également une forme de péché structurel.

Intégrer cette célébration dans notre vie liturgique n’est pas seulement une réponse à une urgence environnementale. C’est apprendre à regarder la réalité avec des yeux contemplatifs, à la manière de François d’Assise. C’est accueillir le pain et le vin comme les fruits de la terre et du travail humain, en sachant que leur destination ultime est d’être transformés en Corps et Sang du Christ. C’est entrer dans une conversion eucharistique de notre manière d’habiter le monde, nous poussant à vivre avec sobriété, justice et tendresse.

Les Religieuses de l’Assomption sont appelées à vivre en profondeur cette dimension de la foi. Notre spiritualité nous invite à découvrir Dieu présent dans l’histoire, dans les peuples, dans les corps et aussi dans la terre. C’est pourquoi accueillir cette nouvelle fête liturgique avec responsabilité et joie peut être une manière concrète de répondre à notre vocation aujourd’hui.

Celles qui ont participé à ce processus – comme sœur Rekha et sœur Carmela, qui a collaboré aux ateliers sur les Écritures et la Lectio divina écologique – ont été témoins du désir partagé de nombreuses Églises de marcher vers une communion plus profonde, également à travers le soin de la création. Ce chemin œcuménique n’est pas seulement un geste d’unité visible, mais un acte d’espérance au cœur de la crise climatique.

Sainte Marie-Eugénie, passionnée par un christianisme transformateur du monde, se réjouirait sans doute de nous voir contribuer à cette semence œcuménique. En tant que famille religieuse, nous sommes appelées à nous impliquer, à nous former et à transmettre cet esprit de réconciliation avec toute la création. Le Royaume que nous annonçons a aussi le visage d’une terre qui chante la gloire de Dieu.